General Movement - Mouvements Généraux
Evaluation Neurologique du Nourrisson de moins d'un an
Guillaume COLLET
Préambule
Cette conférence a eu lieu le 13 Février 2020, animée par Benoit CHEVALIER.
En voici le rapport (Merci à Gael EVANNO et Delphine LIMOGES pour leur notes !), ponctué d’éléments issus de la formation aux General Movement de l’institut Bobath France.
Le “GM Trust Video Guide” peut être demandé au GM Trust via le Dr. Christa EINSPIELER (DPhil, PhD Professor of Physiology – Medical University of Graz).
Les vidéos sont envoyées gratuitement par lien de téléchargement. Elles étaient auparavant vendues 25€ en DVD mais depuis que les coûts de productions ont été financés, un don est possible à la place, pour des projets humanitaires.
Les vidéos relayées initialement sur cette page en illustration ont été supprimées à la demande du GM Trust, hormis quelques vidéos disponibles sur Youtube. Veuillez les demander par mail, et faire la “correspondance” entre les vidéos et les Cas indiqués ici…
Introduction
Définition
Les Mouvements Généraux (General Movements, abrégé en GMs) correspondent à l’analyse de la motricité spontané du nourrisson, sans interaction avec l’environnement, afin d’évaluer un potentiel trouble neurologique.
La mobilité spontanée du nourrisson reflète de manière précise l’état fonctionnel du système nerveux : les GMs permettent ainsi un diagnostic précoce des formes sévères de Paralysie Cérébrale avec une meilleure sensibilité que l’IRM.
Les GMs permettent d’avoir une première évaluation du nourrisson et sur son avenir, permettant ainsi une prise en charge précoce.
L’analyse vidéo des GMs est une accroche, qui invite soit à débuter une prise en charge, soit à compléter avec une échelle d’évaluation complète (HINE par exemple).
Origine et formations
Les GMs ont été développé par Heinz PRECHTL depuis 1997 (Heinz FR Prechtl et al. 1997).
Actuellement, deux courants de pensées co-existent, tout en divergeant sur certains points ; chacun propose des formations sur plusieurs jours :
- GM Trust (Pr FERRARI, C. EINSPIELER, G. CIONI) : groupement international avec forte rigueur scientifique
- Niveau de base, a eu lieu l’année dernière à Brest.
- Niveaux avancés (pour la recherche), à Parme ou Londres, en Anglais.
- Mijna HADDERS-ALGRA : courant moins scientifique, davantage « qualitatif » :
- Formation originale à Groningen (Pays Bas)
- Formations en France par Dr VASSEL Christine et Dr VASSEUR Roger, via l’Institut Bobath France
Qu’est-ce que la motricité spontanée ?
Pendant longtemps a prédominé la pensée magique que le cortex n’existait pas in-utéro, et qu’à la naissance, sous l’expérience de l’environnement, la motricité spontanée apparaissait. Une période blanche semblait exister, durant les 6 premiers mois de la vie, pendant laquelle un handicap moteur ne pouvait pas être dépisté.
D’après les recherches de Christa EINSPIELER (Einspieler et Marschik 2012), la motricité spontanée serait commandée par une zone cérébrale désignée sous le terme de Central Pattern Generator ou CPG (Grillner et Wallén 1999), sans doute située au niveau des noyaux de la base.
Le CPG permet la création d’une activité spontanée chez le bébé, activité modulée par le cortex, sous la forme d’un « bruit de fond », c’est-à-dire une activité motrice permanente en situation d’éveil actif ou en sommeil profond.
Le CPG a ainsi une influence sur toute activité de base primitive observable chez le tout-petit comme la ventilation, succion ou la mastication.
En cas de lésion cérébrale, il n’y a plus de modulation du cortex sur les CPG, on va alors observer une anomalie de la motricité spontanée de ce tout petit.
Les mouvements fœtaux à l'origine de la motricité spontanée
Les GMs émergent à partir de 8-10 SA, ;plus les semaines avancent plus les GMS ont une richesse et une émergence importante.
La niche écologique du bébé in-utéro est extrêmement contenante, limitant ainsi les mouvements fœtaux par résistance du contenant, et favorisant les contacts pied-pied, les mains autour de la bouche… Il semblerait que ces expériences auto-génèrent une activité.
L’expression à la naissance est identique : bien que ces expériences s’arrêtent durant les premiers jours de vie, les mouvements ex-utéro sont les mêmes qu’in-utéro, seul l’habitacle change (décrit par André THOMAS). Le nourrisson a donc besoin d’un environnement adapté pour augmenter son activité.
En cas de naissance prématurée
La situation est plus compliquée pour un prématuré, qui doit lutter contre la pesanteur, qui le plaque au sol.
Les GMs sont alors observables en sommeil profond (REM) ou en éveil actif.
Chez le préma ou le très jeune bébé, une lésion périventriculaire va engendrer un répertoire pauvre donc très peu d’activité spontanée, et davantage de Cramped-Synchronized (CS).
Un nourrisson prématuré peut produire des CS, ce qui ne sera pas péjoratif si elles sont ponctuelles.
Dans le cas où des CS sont systématiques sur chaque vidéo, et qu’à l’âge des Fidgeties ces derniers sont absents : il est possible de prédire un score de Palisano de grade 3 à 5.
Sommaire
En cas de naissance à terme
Il n’est pas pertinent de réaliser d’évaluation des GM entre la naissance et 2 semaines de vie, car le bébé est très marqué par le changement d’environnement et la pesanteur. Le nourrisson va produire des réponses aux déséquilibre occulo-vestibulaires (Réflexe de Moro) polluantes pour l’observation, bien que faisant partie de leur histoire naturelle.
De plus, il n’y a pas encore de mise en forme du corps suite à la perte du contenant ; or les GMs s’observent à plat sur un tapis ferme : la situation est trop compliquée à gérer les 10 premiers jours.
Chronologie d'apparition des Mouvements Généraux
La motricité spontanée présente des caractéristiques chronologiques précises (attention, toujours considérer l’Age Corrigé, même de quelques semaines) :
- A partir de 8 semaines de vie intra-utérine jusqu’au terme : Pre-Term Movements
- Du terme à 8 semaine post-terme : mouvements appelés Writhings (Contorsion)
- De 8 à 12 semaines : mouvements appelés Fidgeties (Gigotement)
- De 12 à 20 semaines les GMs sont progressivement remplacés par la motricité volontaire
A noter que les Pré-Term Movements, décrits par Mijna HADDERS-ALGRA, sont regroupés avec les Writhings par le GM Trust.
Les Mouvements Pré-Terme (PTM)
Ce sont des mouvements initialement embryonnaires, qui persistent à la naissance malgré le changement de milieu.
On les observe sur les temps d’activité chez les bébés nés prématurément, mais ces temps sont très courts, ce qui rend compliqué leur observation. L’environnement peut également influencer la qualité du signal moteur.
Chez les prématurés on observe une grande variation, avec des mouvements de tronc « en vague ». On observe souvent de grandes accélérations des membres inférieurs, des trajectoires très éloignées du plan médian. Chez le bébé prématuré, on ne s’attend pas à un alignement tête tronc. Plus l’enfant est proche du terme, plus il peut être tonique et regroupé, on observe dans ce cas moins d’éloignement de l’axe. L’environnement, notamment sondes et câbles, ne gênent pas les racines de bouger.
Plus on s’approche du terme plus on observe de mouvements de contorsion (Writhings).
A : Pre-Term Movements – Normal
C : Pre-Term Movements – Normal
Critères d’anomalie :
- Poor Repertory (PR) : très faible activité motrice
- Les Cramped-Synchronized (CS) : signe majeur, surtout si elles durent dans le temps ou si elles s’enchainent avec un temps d’absence. Sorte de crispation globale (et non segmentaire) et synchrone en décharge des 4 membres et du tronc, en flexion ou en extension. Ne pas confondre avec réflexe de Moro. Les CS sont hautement prédictives de Paralysie Cérébrale.
- Les mouvements chaotiques (Ch) : mouvements brusques, saccadiques à l’extrême
En cas d’anomalies, il est nécessaire de vérifier, par des vidéos ultérieures si elles sont transitoires ou permanentes.
N : Pre-Term Movements – Abnormal (Poor Repertory + Saccadiques)
Cramped-Synchronized
Mouvements Chaotiques
Les Writhings (WM)
Ils sont observables jusqu’à 6-8 semaines post-terme.
Il s’agit de mouvements de contorsion, sorte de vague motrice, qui part d’une extrémité du membre supérieur, suivi d’un regroupement, puis qui s’étend aux membres inférieurs qui s’allongent.
Roger VASSEUR parle de mouvement « d’essorage ».
Ces mouvements sont très variables avec des amplitudes assez grandes. Ce sont des mouvements segmentaires, et non globaux.
Proche du terme on observe des mouvements proches du visage, puis les mains s’éloigne, les MS partent en extension doucement puis reviennent.
Plus on s’approche de 6-8 semaine, plus les membres vont se rapprocher progressivement de l’axe du corps, tandis que le tronc participe moins.
Les poings fermés sont une caractéristique du 1er mois, ne doivent pas alerter ; à partir du 2e mois on observe davantage de mains ouvertes.
H : Writhings Movements – Normal
G : Writhings Movements – Normal
Critères de qualité
L’enfant se met en mouvement, puis fait une pause et reste immobile, puis se remet en mouvement ; ce n’est pas la quantité de mouvement qui importe, mais leur qualité (Cf Tableau ci dessous).
O : Writhings Movements – Abnormal (Répertoire Pauvre, redondances)
Critère | Normal | Anormal |
---|---|---|
Aspect spatial = Complexité | Mouvements dans toutes les directions, | Répertoire Pauvre = peu d’activité (bébé « flat ») |
Occupation de l’espace vertical et horizontal | CS, Chaotique | |
En amplitudes complètes (Full Range) | Prédominance en large ou faible amplitude ou Mouvement unique | |
Aspect temporel = Variation | Imprévisibilité | Monotonie |
Fluidité | Vitesse Variable, | Lente ou rapide, invariabilité |
Rotations présentes, fluides et « élégantes » | Absence de rotation ou rare | |
Début et fin de mouvements : accélérations et décélération progressives | Peu de fluctuation ou saccades (Jerky) | |
Absence de Trémulations ou rares (possibles chez les préma) | Trémulations fréquentes |
Evaluation qualitative de Prechtl à l’âge du Writhing ou des mouvements Pré-Terme :
- Normal
- Répertoire pauvre
- Mouvement « cramped synchronised »
- Mouvements chaotique.
- Hypokinésia : absence de mouvement pendant plusieurs heures (rare)
Les Fidgeties (FGM)
Temporalité
A partir de 6-8 semaines de vie débute une période de tuilage où l’on retrouve à la fois des Writhings et des Fidgeties ; l’apogée des Fidgeties est à 12 semaines, puis disparaissent à 15-20 semaines.
Description
Les Fidgeties, qui se traduisent par « gigotements », correspondent à une activité motrice initialement d’amplitude faible et de vitesse modérée, qui va peu à peu augmenter avec le contrôle supraspinal.
Ce sont de petits mouvements segmentaires, comparable à du « break-dance », incessants, de l’ensemble du corps, avec notamment des mouvements circulaires des Membres supérieurs, qui deviennent de plus en plus ample et rapide avec le développement du contrôle supraspinal.
I : Fidgety Movements – Normal + : pas totalement développés
Utilité
Ces mouvements permettent initialement de créer des alertes visuelles à partir de petits mouvements, que l’enfant va capter du regard, et se placer en Posture tonique asymétrique. Une fois en posture asymétrique, ces mouvements vont exciter la vision périphérique de l’enfant, lui permettre de faire des réglages en termes de vitesse, d’amplitude de ces mouvements, pour, finalement, amener cette main à la bouche.
Plus le temps passe, plus l’activité volontaire va inhiber cette activité spontanée.
L’âge idéal pour observer ces bébés est donc 12 semaines en Age Corrigé (même pour une naissance 3 semaines avant terme).
J : Fidgety Movements – Normal ++ : MS droit notamment
Pouvoir Prédictif
Ces mouvements sont les plus prédictifs d’une anomalie neurologique (Heinz FR Prechtl et al. 1997) :
- Si un nourrisson présente des writhings de qualité modérée, notamment avec des CS, mais que les fidgeties apparaissent de bonne qualité : le pronostic est bon
- Si les writhings sont pauvres et que les fidgeties sont altérés : le pronostic est mauvais
- La normalité des fidgeties à 15 semaines présente grande valeur prédictive favorable
Evaluation qualitative de Prechtl à l’âge des Fidegties :
- Abondants, continus
- Fluides, imprévisibles, dans différents plans et non dans un seul
- Discontinus
- Occasionnels: très faible activité (Enfant « flat »)
- Anormaux : mouvements dont l’amplitude, la vitesse, le caractère saccadique est exagéré modérément ou de façon importante.
- Ces mouvements anormaux sont rares, leur valeur prédictive est basse
- Absents : si ils ne sont jamais observés entre 9 et 20 semaines.
- L’absence de fidgeties est hautement prédictive d’une évolution défavorable (paralysie cérébrale spastique ou dyskinétique).
- Anormaux : mouvements dont l’amplitude, la vitesse, le caractère saccadique est exagéré modérément ou de façon importante.
Autre anomalie à observer : Mouvements permanents de langue.
L : Fidgety Movements – Normal ++
Anomalies
Il est plutôt facile de repérer les anomalies importantes : l’enfant totalement mou au tapis, ou au contraire les décharges toniques de grande amplitude et intensité.
A l’inverse, un enfant qui bouge en permanence, de manière fluide, sans que l’observateur puisse prévoir ce qu’il va faire : le mouvement est « beau », l’enfant va bien.
La difficulté est l’enfant entre les deux.
A noter que les bébés macrosomiques ont les mêmes GMs que les autres, ce n’est pas un facteur de risque.
T : Fidgety Movements – Absence de Fidgety
L’analyse de vidéo
Lorsqu’on observe une vidéo sans être spécifiquement formé, il faut adopter la Gestalt Perception, c’est-à-dire s’interroger de manière globale : cet enfant bouge-t-il normalement, ou pas normalement ? Puis affiner la réflexion : en raison de ses GM ou de la faible production de mouvement volontaire ?
Il faut réussir à faire abstraction des mouvements volontaires (rotation du cou par exemple), pour observer les mouvements de « bruit de fond ».
Il est important d’avoir des vidéos « étalons », d’enfant présentant une motricité parfaite, pour rétablir la norme avant d’analyser des vidéos : à force d’observer des nourrissons présentant une motricité altérée, l’analyse peut finir par être faussée.
L’analyse sans vidéo est possible quand l’enfant va très bien, son état « saute aux yeux » ; il est en revanche très difficile de percevoir une anomalie.
Conditions de réalisation des films
- Idéalement nourrisson en état 4 de Prechtl (H. F. Prechtl 1974): éveil agité sans pleurs
- Durée
- Théoriquement 1h d’enregistrement vidéo, en extraire 3 séquences exploitables de 5 minutes.
- De manière pragmatique, filmer pendant l’anamnèse, soit entre 12 et 15 min, en extraire 3 à 5 min.
- Éventuellement recommencer plus tard ou un autre jour si le film n’est pas représentatif du nourrisson.
- Pour un nourrisson prématuré, dont les phases d’éveil sont courte, il est nécessaire de filmer pendant assez longtemps pour avoir une séquence exploitable.
- Position :
- Nourrisson sur le dos, sur une surface plate et ferme.
- pour nourrisson prématurés : dans un cocon adapté, qui va favoriser la « stabilité » du nourrisson, tout en limitant un peu les mouvements sans empêcher totalement le bruit de fond.
- Vêtements :
- nourrisson prématurés : dénudé, sans couche si possible
- Fidgeties : en couche ou en body, sans chaussettes. Si l’enfant ne supporte pas d’être déshabillé, il est possible de le laisser habillé.
- La température doit être adaptée.
- Activité et interaction :
- L’enfant ne doit pas pleurer
- Il ne doit pas être en cours de succion : pas de tétine, qui inhibe les GMs
- Pas d’interaction avec son environnement :
- pas de jouets ;
- placer l’enfant entre 2 grandes toiles de peintre blanche, à 50cm de l’enfant, parents aux pieds.
- Caméra discrète fixée au plafond ou sur pied de micro très en hauteur.
- Le moins de bruit possible ni de lumière vive
- Si l’enfant roule sur le côté, les GMs sont moins visibles. En cas de doute, remettre l’enfant sur le dos.
- Ne pas filmer avec un smartphone au-dessus, ne pas demander de films aux parents.
Trois Critères d’évaluation
Variation +++
- Caractère temporel
- C’est le plus important dans l’analyse des GMs
- Le mouvement doit être imprévisible, non redondant (voire stéréotypé dans les cas extrêmes).
- Les pattern moteurs doivent être riches et variés.
- En cas d’anomalie de mouvement redondant, il est possible de voir une vidéo en accéléré, la redondance devient évidente.
Illustration VARIATION (Hadders-Algra 2003)
Nourrisson âgé de 3 mois post-terme, période des Fidgety. Procédé : 2’ de vidéo, 5 sec entre chaque image
A => images très différentes
B => mouvement redondant, image fréquemment identique. Diagnostic ultérieur de PC diplégie spastique.
Complexité ++
- Critère spatial
- L’enfant doit occuper l’espace
- Le mouvement ne doit pas être dans un seul plan (pédalage par exemple), mais dans les 3.
Illustration de la COMPLEXITE (Hadders-Algra 2003)
Nourrisson âgé de 3 mois post-terme, période des Fidgety. Procédé : 0,24 s entre chaque image.
A => Pas une seule photo identique, toujours une petite différence, rétroversion de bassin, mouvements de flexion extension
B => Image figée, coup de vent permanent, pas de variation sur le MI gauche. Diagnostic de quadriplégie prédominante à Gauche.
Fluidité +
- L’enfant doit avoir des accélération et décélérations graduelles en vitesse et en force (= « smooth »),
- pas de mouvements brusques,
- Les début et fins de mouvements ne doivent pas être saccadées.
- C’est le critère le plus visible sur une vidéo, pourtant c’est le moins important dans l’analyse des GMs. Il faut réussir à en faire abstraction pour se concentrer sur les 2 premiers.
- Dysfonctions :
- Saccadiques (jerky)
- Rigides (stiffy)
- Trémulations
Scoring des Fidgeties d’après GM Trust
Il est nécessaire de les évaluer de manière plus précise que les Writhings.
Critères à observer :
- A 12 semaines : y’a-t-il bien contact entre les pieds ? entre les mains ? = Critère de qualité
- Le nourrisson parvient-il à rouler d’un coté sur l’autre ? Qu’est-il capable d’en faire ?
- En posture asymétrique, il n’y a pas qu’un seul côté, mais un coté bouge plus que l’autre.
Le GM Trust propose une évaluation sur 28, avec un score qui se dégrade en cas d’anomalie : “The Motor Optimality Score”.
Un score inférieur 14/28 est un pronostic défavorable.
Il comporte :
Une observer des GM : normaux ou anormaux ?
Les Pattern moteurs :
- Tête au milieu ?
- Posture naturelle asymétrique ?
- Position variable des doigts ?
- kicking normal ou anormal ?
- Le nourrisson joue-t-il avec ses vêtements ?
- Les jambes glissent-elles sur le sol ?
- Y’a-t-il des contacts entre les mains et les cuisses ?
- Occurrence d’opisthotonos (« Arching »)
Ce scoring est intéressant car il associe les critères des GMs à l’émergence de la motricité volontaire.
Vous trouverez “The Motor Optimality Score” à la page 7 de la publication (libre d’accès) qui l’a établi :
“Einspieler, C. & al. Cerebral Palsy: Early Markers of Clinical Phenotype and Functional Outcome. J. Clin. Med. 2019, 8, 1616.”
Scoring d’après Mijna HADDERS-ALGRA
Le scoring proposé est davantage qualitatif, non chiffré. Il demande un certain entrainement à l’analyse des vidéos, et éventuellement une concertation entre plusieurs professionnels.
Normaux
- Optimaux (NO) = abondamment variables et complexes et fluides. Fréquence relativement rare (15% de la population générale).
- Sub-optimaux (SO) = complexe et variés, mais absence de fluidité. Le plus fréquent.
Anormaux
- Légèrement (MA) = Insuffisament variables et complexe, et non fluide. 20 à 25% de la population générale à terme à 3 mois.
- Nettement anormaux (DA) = complexité et variation et fluidité extrêmement réduite, voire absente / Durant les PTM ou WM = Cramped-synchronized comme seul pattern observé / Absence ou fidgety ponctuel.
EBP et GMs
Littérature
Les GMs font partie des outils robustes de dépistage dans le référentiel de Novak (Novak et al. 2013) sur la Paralysie Cérébrale.
Le plus haut risque de Paralysie Cérébrale correspond à l’association de Cramped Synchronized à l’âge des Writhings associées à une absence de fidgeties.
Sensibilité
La sensibilité est la fréquence d’un test positif chez un sujet pathologique, c’est-à-dire les cas correctement identifiés comme pathologiques.
Sensibilité des évaluation neurologiques (Bosanquet M, 2013) :
- Evaluation à l’aide des GMs : 98%(Cioni G, 2013)
- Cranial ultrasound : 74%
- HINE : 88%
- IRM 86 à 100% selon les conditions d’examen
Les GMs ont une capacité prédictive forte pour les grades de Paralysie Cérébrale élevée, moins pour les atteintes mineurs à modérées (Einspieler et al. 2015).
Spécificité
C’est la fréquence de tests négatifs chez les sujets non pathologiques, c’est-à-dire les cas correctement identifiés comme normaux.
Dans les cas des GMs, elle est de 82 à 100 % à l’âge des Fidgeties (Einspieler et Prechtl 2005).
Quelle particularité clinique des mouvements du nouveau-né ?
Le GM Trust a déterminé les caractéristiques des GM du nouveau-né pour différentes atteintes/pathologie, en récoltant et en conservant des vidéos de nourrisson, puis en effectuant un suivi longitudinal de ces nourrissons, jusqu’au diagnostic ; ils peuvent donc observer les vidéos de manière rétrospective.
Il s’avère que les patterns spontanés du nourrisson sont significatifs de la pathologie dont ils sont porteurs :
- Paralysie cérébrale bien sur
- Mais aussi maladie métabolique
- Syndrome de Rett
- Trouble du spectre autistique
- Plus récemment en cas d’atteinte cognitif modéré, les GMs sont modifiés
Dépistage précoce
On sait l’importance du diagnostic précoce dans le cadre des pathologies neurologiques, afin de débuter des prises en charge le plus tôt possible.
Pourtant, ce dépistage est souvent tardif : au Danemark par exemple autour de 11 mois (Granild-Jensen et al. 2015), malgré des signes précoces et des anomalies rapportées par les parents. Ce temps de latence, similaire en France, est préjudicable pour l’enfant.
Les GMs permettent au moins d’alerter très tôt sur l’état neurologique de l’enfant, voire en présence de certaines anomalies de poser un pronostic précoce.
Les Outils associés
Hammersmith Infant Neurological Examination (HINE)
Outil de référence du GM Trust, pourtant peu utilisée en France.
Elle présente une meilleure spécificité que le Bilan Neurologique d’Amiel-Tison, car elle évalue les jonctions, et elle permet un étalonnage rapide des enfants, en étant corrélée avec les GMs.
Il semble primordial que les kinésithérapeutes français ajustent leurs modalités d’évaluation du nourrisson, afin de prouver l’efficacité de nos interventions, en passant par l’utilisation d’échelles scorées et validées, telles que la HINE, l’Alberta Infant Motor Scale (AIMS), ou la Bayley Scales of Infant Development (BSID).
La HINE aborde notamment :
- Manœuvre d’abduction : intéressante sur les plexus brachiaux
- Prono-supination
- Couché-assis latéral : intéressant pour voir les asymétries, tandis que le tiré-assis est intéressant dans l’ajustement avant-arrière
- Suspension verticale : activité des MI naturelle
- Station assise : elle est acquise avant de s’asseoir seul, ce qui est parfois oublié au nom de la motricité libre. Tenir assis est une habileté, qui doit être expérimenté sur les genoux, dans les bras, avec une aide extérieure. Elle est acquise entre 7 et 9 mois ; à partir de 9 mois l’enfant doit effectuer des franchissements d’axe en position assise, et non pas être seulement rigide.
- En décubitus : jonctions haut-bas, mouvement de kicking verticaux à partir de 3 mois, touche ses cuisses à partir de 4-5 mois, touche ses orteils vers 5-6 mois. Éléments majeurs dans le développement de l’enfant ; l’intégration du bas du corps est indispensable au développement de praxies complexes.
- Procubitus : redressement à 4 mois, crawling, quadrupédie.
Il s’agit de nombreux éléments simples qui n’apparaissent pas forcément dans les bilans habituels.
Conclusion
Le GMs sont essentiels dans l’évaluation clinique du tout-petit, et permettent d’établir des drapeaux rouges (CS, PR, Ch, Absence de Fidgeties, trouble précoce des jonctions).
L’analyse rétrospective de vidéos « anciennes » permet également de repérer des éléments a postériori sous l’éclairage du diagnostic posé depuis la réalisation de la vidéo, parfois passé inaperçu auparavant.
Bibliographie
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L’Association des Kinésithérapeutes Pédiatriques du Territoire Normand
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